Ce 15 décembre s’est tenu le Conseil municipal au cours duquel le Maire de Bordeaux a présenté le budget pour l’année 2015. Il révèle une explosion des dépenses liées aux équipemaents pharaoniques exigés par Alain Juppé, un report à une date inconnue de projets pourtant promis aux Bordelais depuis de nombreuses années. Ce budget montre également que la Ville de Bordeaux redevient excessivement endettée et que le Maire va augmenter les impôts en 2015. Voici mon intervention.
Monsieur le Maire, mes chers collègues,
C’est sans doute le pire budget que vous ayez présenté depuis votre arrivée à Bordeaux en 1995. Probablement le budget le plus anti-social jamais présenté dans ce conseil. Ce document budgétaire est la démonstration flagrante de la différence qui existe entre vos beaux discours et la réalité. Vous maniez de manière effarante la langue de bois et la logorrhée de votre adjoint à la culture est, disons le, un modèle du genre.
À grand renfort de publications onéreuses, de réunions publiques parfois lénifiantes et de communiqués de presse pléthoriques, vous nous avez expliqué combien vous alliez mettre la culture au centre de ce mandat, que le social était une de vos préoccupations, que le logement, juré craché devenait la priorité des priorités. Au bout du compte, ce budget 2015 vient confirmer nos appréhensions : vous avez durablement sacrifié les budgets qui finançaient le quotidien et la proximité pour les reporter sur les équipements de prestige et vous prévoyez d’étrangler fiscalement les bordelaises et les bordelais pour y parvenir.
I- Explosion des dépenses de prestige
Nous avons déjà beaucoup évoqué le coût annuel des loyers que la Ville de Bordeaux va devoir payer chaque année pour la Cité municipale et le Grand Stade. 11,5 millions d’euros cumulés pour ces deux équipements. Et on parle bien ici d’un coût net, autrement dit, lorsqu’on dénonce les 6,7 millions d’euros de loyer pour le Nouveau stade, c’est après avoir déduit les recettes nettes garanties et la redevance que nous faisons payer au club. Donc chaque année, ces deux équipements vont nous coûter plus de 11 millions. À titre de comparaison, la création d’une crèche c’est 2 millions d’euros, la construction d’un groupe scolaire c’est 5 millions d’euros. Ce ne sont pas des chiffres que j’invente, ils sont dans le document de présentation de ce budget. C’est autant d’équipements du quotidien auxquels il faudra renoncer car en période de restriction budgétaire, c’est fromage ou dessert et non fromage et dessert. Les bordelais souffriront de vos choix parce que demain, il sera encore plus compliqué de trouver une crèche, il manquera des places dans les écoles, les piscines déjà saturées deviendront inaccessibles. Vous avez signé de très nombreux permis de construire, la population bordelaise va donc continuer à sensiblement augmenter alors que l’offre de services publics va dans un même temps péricliter.
Cette situation dramatique en matière d’investissement va d’ailleurs, nous l’avons appris tout récemment, être aggravée par la très forte augmentation du coût de la Cité des civilisations du Vin.Pas une seule fois vous avez évoqué cette augmentation aux élus. Ni en commission, ni en conseil municipal, ni dans le document d’orientation budgétaire. Vous vous êtes fendu d’un communiqué de presse début décembre pour dire que la Ville de Bordeaux allait sans sourcilier signer un chèque supplémentaire de 14,5 millions d’euros. C’est deux fois la baisse des dotations de l’État. Quand on pense à combien vous nous rebattez les oreilles avec cette baisse : dans la presse, à chaque conseil, dans le document d’orientation culturel, dans le document d’orientation budgétaire, cela laisse pantois.Vous avez signé des marchés, assisté d’une association largement pourvue en personnel dont la seule mission était d’évaluer ces coûts, vous avez accepté ces marchés publics sans vous rendre compte qu’il y avait un problème dans l’estimation fixée. On parle d’un dépassement de près de 20% et vous essayez de passer entre les gouttes. Nous vous demandons solennellement d’expliquer aux élus pourquoi cette augmentation, qui en est responsable, quels sont les recours que la Ville compte engager.
II- Des budgets du quotidien sacrifiés
Qui va payer vos dépenses somptuaires ? Les Bordelais. Celles et ceux à qui vous aviez promis l’équipement sportif de l’ancien Marché Victor Hugo, celles et ceux à qui vous aviez promis la passerelle Eiffel, celles et ceux à qui vous aviez promis la Maison des danses à Ginko, celles et ceux à qui vous aviez promis la piscine dans le quartier Belcier. Tous ces projets repoussés à une date inconnue.
Et pas seulement. Vous présentez un budget logements amputé de 40 % en investissement. Avec le déficit de la Ville en matière de logement social, avec des listes d’attente qui explosent, vous supprimez 2 millions d’euros à l’investissement dans le logement. Quand on pense qu’il y a à peine un mois, vous teniez une conférence intitulée « I loge you », là encore à grand renfort de communication pour expliquer que Bordeaux faisait pour le logement, on peut se lamenter. Ce serait risible si ce n’était pas aussi dramatique. En 3 ans, le budget global augmente de 20%. La subvention au CCAS de 3% et vous vous en réjouissez, c’est du cynisme Monsieur le Maire. Il n’y a pas de budget social sanctuarisé comme le prétend l’adjointe au social. Avec près de 20% de Bordelais qui vivent sous le seuil de pauvreté, cette subvention au CCAS aurait au moins du suivre l’augmentation du budget général et parler de sanctuarisation, c’est se moquer littéralement des plus pauvres.
III- Un endettement toxique
Lorsque vous avez pris les commandes de la Ville, vous aviez commencé à la désendetter et l’opposition, j’ai repris les procès verbaux, vous a régulièrement salué pour cela. Aujourd’hui, votre vertu financière est oubliée. Vous êtes même en train de remettre les finances de la ville dans l’état dans lequel vous les aviez trouvées : en gros, après moi, le déluge. En seulement 3 ans, l’annuité de la dette à augmenté de 32% passant de 28 à 43 millions d’euros. Dans le même temps, les collectivités de la même strate diminuaient leur endettement de 5%.
Avez toutes ces dépenses, on pouvait se demander par quel tour de passe-passe vous alliez bien pouvoir boucler le budget. Et là, coup de chance exceptionnel, la loi MAPTAM vous permet de céder à la CUB les actions de Régaz. Là encore, sans véritable débat. Bien sur, j’imagine que le vendeur Maire de Bordeaux a réussi à s’entendre sur le prix avec l’acheteur Président de la CUB. Cela n’a pas du vous poser de cas de conscience, d’autant que c’est une manière de faire supporter aux autres communes de la CUB les choix de la Ville de Bordeaux. Néanmoins, vous n’allez pas pouvoir vendre tous les ans les bijoux de famille. À un moment où à un autre, il n’y en aura plus. Or, les dépenses d’investissement et de fonctionnement liées au Stade, à la Cité municipale, au centre des civilisations du vin seront à assumer pendant 20 et 30 ans et on se demande donc comment vous allez vous y prendre.
IV- Une augmentation des impôts locaux inacceptable
Le coup de grâce c’est l’augmentation des impôts. Là encore, rien n’a été indiqué en commission, le document de présentation renvoie le débat à l’année prochaine. Par déduction, vous augmenterez d’environ 3 points de fiscalité. Bordeaux, et cela est rappelé par la plupart des baromètres, est une des villes les plus fiscalisées de France. C’est aussi une des villes, je viens d’en faire la démonstration, qui est la moins solidaire. Cette augmentation de la fiscalité va encore, parce que la taxe d’habitation est une taxe injuste, pénaliser d’abord les plus faibles revenus.
Mais dans tous les cas, permettez de soulevez votre très curieuse contradiction qui révèle à elle seule l’artifice de votre raisonnement. L’adjoint aux finances nous dit : l’augmentation des impôts nous permet de compenser la baisse des dotations de l’État. Mais si c’était vrai, vous ne devriez pas avoir à sabrer les projets évoqués ou alors c’est la double peine : augmentation de la fiscalité qui frappent les bordelais et abandon des projets que j’ai cités plus haut.
D’une manière générale, ce budget annonce une véritable bérézina financière supportée par les bordelaises et les bordelais, une bérézina qui est la conséquence directe de vos choix politiques insupportables. Vous n’avez jamais rien voulu entendre. Vous n’en avez fait qu’à votre tête et vous demandez maintenant aux bordelais de passer à la caisse. La situation est telle que bientôt plus aucune communication, aussi puissante soit-elle, ne parviendra à cacher votre gestion scandaleuse. Vous comprendrez Monsieur le Maire que notre groupe votera contre ce budget irresponsable.