Je suis intervenu ce 27 mai lors du Conseil municipal pour demander au Maire de Bordeaux de condamner fermement l’invocation d’une clause de conscience qui permettrait aux élus de la majorité de refuser de marier des personnes homosexuelles.
Monsieur le Maire, mes chers collègues,
Cette délibération évoque la promotion par la ville d’une politique transversale en direction des associations qui engagent des initiatives en faveur de l’égalité des chances, de la lutte contre les discriminations et de la diversité culturelle. Cette présentation nous révèle que la majorité aurait une politique de lutte contre les discriminations. Pourtant Monsieur le Maire, œuvrer en faveur du vivre ensemble ce n’est pas seulement donner quelques euros pour se donner bonne conscience. Il s’agit également d’y croire. Comment lutter contre les discriminations quand celles-ci sont commises et assumées par des membres de votre majorité ?
La semaine dernière dans Sud Ouest, votre 1er adjoint a déclaré qu’il refuserait de marier des personnes homosexuelles. Il entend donc braver la loi au motif que marier des homosexuels heurte sa conscience. Cette déclaration, choquante, n’est que le point d’orgue de positionnements plus que douteux de la part de plusieurs de vos élus. Est-ce qu’on peut comprendre que les adjoints ou délégués en charge du social, de la petite enfance, de la lutte contre les discrimination ou de la diversité soient les moins tolérants, les plus militants contre l’égalité, n’hésitant pas pour chacun à défiler contre la loi et en le revendiquant fièrement ? Ne croyez-vous pas qu’il y a là une erreur de casting ? D’autant que d’autres membres de la majorité ont quant à eux exprimé leur entier soutien à cette loi. J’attire par ailleurs votre attention sur le fait que cette position est contraire à la charte européenne (sur l’égalité femmes/hommes) que vous soumettez au vote un peu plus tard.
Si demain un de vos élus déclare qu’il n’a rien contre ces gens là mais qu’il refuse de célébrer un mariage entre deux personnes de couleur noire. Vous resterez là encore sans réaction ? Vous lui direz : « je comprends, ça heurte ta conscience on va trouver une autre élu » ?
Hier soir à Bordeaux, un jeune de 18 ans s’est fait agresser par des anti-mariage pour tous. Il a terminé aux urgences avant d’être reçu au commissariat de police. Cette agression se rajoute à la longue liste de celles que nous avons déjà dénoncé, dans un climat qui a récemment fait dire à l’ONG Idaho que Bordeaux est la plus grande ville de France où les personnes homosexuelles sont les moins bien acceptées et qui pointe dans son rapport la responsabilité de la Mairie.
Ne croyez-vous pas qu’il est temps d’être ferme, et de commencer à faire le ménage dans vos propres rangs ? Pouvez-vous ici solennellement condamner les propos d’Hugues Martin et les autres élus qui sont sur sa position en leur rappelant qu’ils sont élus de la République et qu’à ce titre là, ils n’ont pas à exprimer d’état d’âme dans l’application de la loi de la République ? Vous enverriez alors un signal fort et positif en direction de la lutte contre les discriminations.
PS : Sans surprise, le Maire a refusé de condamner les propos d’Hugues Martin et valide donc la clause de conscience. Plus étonnante en revanche est la position du groupe Vert explicitement favorable à cette clause de conscience qui exonère certains élus de marier les homosexuels.
Intervention in extenso de Pierre Hurmic (président du groupe Vert) au conseil municipal du lundi 27 mai 2013
« Suite à la parution dans la presse des propos d’Hugues Martin, je dois dire que nous ne partageons pas l’analyse de notre collègue Matthieu Rouveyre dans la mesure où nous considérons qu’Hugues Martin s’est sérieusement engagé pour indiquer qu’il s’assurera du fait que les mariages soient célébrés également dans de bonnes conditions.
Hugues Martin dans ses déclarations, que j’ai sous les yeux, indique qu’il est opposé à cette loi et qu’il en fait une affaire de conscience. Tout le monde a le droit de dire publiquement qu’il est favorable ou défavorable à une loi, il me semble que c’est le B.A.-ba de la démocratie.
Hugues Martin dit qu’il ne le fera pas parce qu’il sait qu’il y aura suffisamment d’élus prêts pour célébrer ces nouveaux mariages, et qu’en tant que responsable il va s’assurer que les mariages soient tous célébrés également.
Nous considérons quant à nous être rassurés par les déclarations d’ Hugues Martin à ce niveau là.La liberté de conscience, tous ici nous devrions nous battre pour la liberté de conscience, c’est un principe essentiel. J’ai envie de dire qu’au-dessus des lois de la république il y a la conscience individuelle, heureusement.
Je dirai d’un dernier mot, en ce qui me concerne, j’ai toujours préféré la conscience à la consigne. Donc je pense que je serai mal venu aujourd’hui pour reprocher aujourd’hui à titre personnel et au nom de mon groupe à Hugues Martin d’avoir dit publiquement ce qu’était sa conscience.
Heureusement qu’il y a des objecteurs de conscience. En ce qui concerne notre groupe nous avons toujours été très protecteurs, nous avons assuré la défense des objecteurs de conscience en leur temps, aujourd’hui il y a aussi, vous savez, des objecteurs de croissance, nous sommes très proches de la liberté de parole qui leur est donnée.
Donc voilà mes propos que je souhaitais apporter : il ne s’agit pas ici de stigmatiser les propos tenus par Hugues Martin qui, en ce qui nous concerne, nous respectons.”
Intervention in extenso de Vincent Maurin (président du groupe PC) au conseil municipal du lundi 27 mai 2013
“Pour ce qui nous concerne nous avons à la fois été un peu étonnés des propos de Monsieur Martin mais nous avons compris qu’il s’agissait d’une liberté individuelle qui lui incombait et nous faisons entièrement confiance à l’esprit républicain qui anime le maire de la Ville et la grande majorité des élus municipaux de ce conseil municipal pour que l’application de la loi se fasse de manière stricte, de manière “secure” pour tout le monde et avec évidemment le souci premier d’appliquer la loi et de rendre la mission de service public que devra avoir la Ville de Bordeaux en ce qui concerne le mariage pour tous.”