Un couple de jeunes femmes bordelaises a eu un enfant au mois de février, et ce qui est pour elles le plus bel évènement de leur vie s’est transformé pour la Mairie de Bordeaux en une offense qu’elle entend leur faire payer. Le jour de l’accouchement, une personne déléguée de l’État civil recueille à l’hôpital la déclaration de l’enfant auprès de la maman. Le couple a décidé de lui donner en deuxième prénom le nom de famille de la compagne de la maman biologique. L’officier est sceptique mais depuis la loi du 8 Janvier 1993, les États civils ne peuvent plus refuser l’enregistrement d’un prénom, ils peuvent seulement demander leur suppression a posteriori.
Interrogée sur ce second prénom, la maman explique. Elle est homosexuelle et son couple désirait un enfant. Elle procède à une IAD (Insémination Artificielle avec sperme de Donneur) en Espagne (interdit en France depuis la Loi de Bioéthique de 1994 mais légal et pratiqué couramment dans d’autres pays européens : Belgique, Pays-bas, etc). Le lendemain même de l’accouchement, l’Etat civil de la Mairie de Bordeaux téléphone à la maman encore alitée à l’hôpital : “Ce que vous avez fait est illégal, ce n’est pas normal et ça ne va pas se passer comme ça, ça finira au tribunal“. C’est alors que le Maire de Bordeaux a décidé de saisir le procureur de la République pour faire interdire le second prénom, au motif qu’il “est contraire à l’intérêt de l’enfant“.
Le procureur reçoit la demande de la Mairie et interpelle le Juge au Affaires Familiales pour faire modifier ce second prénom. Dans son courrier le procureur explique : “Le 6 mars 2007, Monsieur le Maire de Bordeaux a saisi le Parquet sur le choix du second prénom qui ne correspond à aucun usité mais semblerait être un nom patronymique, peut-être celui du compagnon ou de la compagne de la mère“.
Le 20 septembre, le JAF entend la maman ainsi que le procureur. La première fait observer que cette pratique est admise par d’autres mairies, le second défend le contraire. Le JAF sursoit à statuer et invite les parties à produire leurs pièces pour le 15 novembre prochain.
Grâce à l’association “Enfants d’Arc en Ciel”, nous nous sommes procuré plusieurs attestations de couples homoparentaux selon lesquelles le deuxième prénom de l’enfant est précisément le nom de famille du compagnon ou de la compagne du parent biologique. C’est au contraire dans l’intérêt de l’enfant qu’il faille permettre que l’État civil reconnaisse le lien avec ce deuxième parent. Et même si la Mairie de Bordeaux ne l’entend de cette oreille, il faut que les couples homoparentaux (ou en passe de le devenir) de Bordeaux sachent que malgré la croisade d’arrière-garde de cette collectivité, ils ont le droit à cette reconnaissance. C’est ce que confirmera, à ne pas en douter, le Juge aux Affaires Familiale le 15 novembre prochain. Pour l’heure, nous demandons que le Maire de Bordeaux se désiste de son action en justice, présente ses excuses au couple et mette en place des formations de sensibilisation aux discriminations en général et aux discriminations homophobes en particulier à la fois à l’égard des services mais également des élus. Dans l’hypothèse où Alain Juppé s’entêterait, nous saisirons la HALDE et le Justice.
Edit : le juge a donné tort aux mamans et M. Juppé est ainsi à l’origine d’une jurisprudence particulièrement malheureuse pour les familles homoparentales …