Vendredi soir, à 21 heures, soit la veille au soir d’un week-end férié, est arrivée dans les casiers des conseillers municipaux de Bordeaux membres de la commission des affaires financières une délibération autorisant la cession par la mairie de 15 millions d’euros d’actions qu’elle détient dans le capital de Gaz de Bordeaux.
Cette délibération doit être examinée dès mardi, pour être votée par le conseil municipal du 27 novembre prochain. Nous le savions déjà : Alain Juppé ne fait pas ce qu’il dit, ni ne dit ce qu’il fait. Certains espéraient cependant encore que la rumeur selon laquelle il revenait changé n’était pas totalement infondée. En achetant des actions avant l’élection pour les revendre aussitôt après, la majorité de droite spécule sur l’autel de la confiance flouée des électeurs et des salariés de Gaz de Bordeaux à qui elle a dissimulé, du début à la fin de la campagne électorale, sa volonté de réaliser cette cession.
Les paroles de M. Jauffret au moment de l’acquisition de ces actions valent aveu du stratagème électoral: « On ne voulait pas avoir l’air de laisser tomber Gaz de Bordeaux.»(AFP le 09/05/2006 12h49) Alain Juppé, qui, lors du premier conseil municipal, prétendait vouloir « faire de Bordeaux un laboratoire de la démocratie », ne s’en tient pas à cette seule manœuvre.
Pour faire avaler cette couleuvre à des citoyens attachés depuis toujours au service public du gaz, la mairie pousse la malhonnêteté intellectuelle jusqu’à recourir à un camouflage sémantique par lequel elle espère nous tromper : il ne s’agirait point, selon elle, d’une pure et simple vente d’actions, mais d’une « Convention de portage », comme l’indique le titre de la délibération proposée.
La manœuvre s’avère d’autant plus inacceptable que les juristes de Dalkia et Gaz de France, pourtant bénéficiaires de ladite convention, ont eux-mêmes requalifié l’opération en « cession » pour s’opposer à ce que la mairie de Bordeaux transfère ses parts à la Caisse des Dépôts. Cette manœuvre s’inscrit dans une stratégie plus vaste. Rappelons-nous que, lors du débat sur la fusion entre GDF et Suez, Hugues Martin avait déposé à la va-vite, avec deux autres parlementaires de droite, un amendement visant à permettre la privatisation de Gaz de Bordeaux.
Ce désinvestissement de la Mairie dans le capital de Gaz de Bordeaux n’est qu’un premier pas vers une totale privatisation de l’entreprise. La cession proposée à la commission des affaires financières n’est donc qu’un premier pas vers la privatisation totale de l’entreprise.
Cette délibération, affectant le service public de l’énergie, et ainsi le tissu social, à Bordeaux et dans l’agglomération, impose un véritable débat démocratique Nous demandons donc à Alain Juppé de traduire en actes son souhait de « faire de Bordeaux un laboratoire de la démocratie » en organisant une consultation citoyenne sur le sujet. En attendant qu’il adopte cette attitude, nous nous engageons d’ores et déjà aux côtés des syndicats contre ce projet de cession.