Protégeons les acquis des salariés du réseau TBC

((/v2/public/.pourqui8_m.jpg|Tramway Bordeaux|L|Tramway Bordeaux, mai 2009)) Je publie ici mon intervention de ce jour à la Communauté Urbaine de Bordeaux concernant le changement de délégataire du réseau de transport de l’agglomération. Ma proposition d’annexer la lettre de Kéolis à la délibération a été acceptée. Une question se pose sur la valeur juridique de cet acte. Quoi qu’il en soit, il me semble qu’en la votant en Conseil, cette lettre devient une base d’engagements forts de ne pas toucher aux droits des salariés. Si l’avenir venait à me démentir, je monterai en première ligne pour défendre ces acquis. Monsieur le Président, Mes cher(e)s collègues, En l’état actuel, Monsieur le Président, j’ai une très forte envie de voter contre la délibération qui nous est présentée. Il peut toutefois exister une solution qui emporterait une approbation de ma part et de certains de mes collègues. J’y viendrai. Mon intervention s’articulera autour des trois points suivants : 1) Un contexte de flou artistique 2) Quelle est la situation actuelle des salariés du réseau TBC ? 3) Peut-on oui ou non protéger les acquis sociaux des agents ? Vous me permettrez de préciser que je suis particulièrement sensible aux enjeux de ce dossier. Mon père, chauffeur receveur depuis 31 ans sur le réseau TBC est en ce moment même en bas, dans la rue, aux côtés de ses collègues manifestants. __1) Contexte : le flou artistique__%%% Nous sommes, avec cette délibération, face à une nouveauté. Elle peut être un pari réussi ou augurer d’un avenir incertain. Toutes les parties prenantes ont des inquiétudes légitimes : les mairies et les usagers, concernant les désertes ou les fréquences de bus et tram, mais aussi les salariés, inquiets pour leurs conditions de travail et le service public dont ils ont la charge. Pour ne pas être long, je limiterai justement mon intervention à la question sociale. Il faut entendre que les inquiétudes dont on parle ont largement été alimentées par des déclarations intempestives, des vulgarisations médiatiques ou une règlementation rigide interdisant à la CUB de répondre aux questions sans prendre le risque de recours judiciaire contre la délibération qui nous est présentée aujourd’hui. Mais s’il y a flou, c’est peut-être aussi parce que dans les négociations avec les candidats à la DSP, les grands oubliés sont les salariés. Il n’y a quasiment rien sur les exigences que nous, CUB, pouvions poser aux protagonistes pour être certains qu’on ne dégraderait pas les conditions de travail et les conditions salariales des agents. Les salariés se posent donc une question : à quelle sauce vont-ils être mangés ? Autrement formulé : ont-ils quelque chose à craindre de ce nouveau délégataire ? Comme je le disais précédemment, sachant que rien de précis à leur sujet n’est stipulé, sachant que Kéolis a pu provoquer des remous dans certains agglomérations où cette société est devenue délégataire, sachant également qu’on a pu entendre ici ou là que l’un des leviers pour “optimiser la productivité” était les salariés, sachant tout cela, on peut comprendre la grogne des agents aujourd’hui. Cela me permet d’enchaîner sur mon deuxième point et d’essayer de répondre à la question suivante : quelle est la situation actuelle des agents du réseau TBC ? __2) Quelle est la situation des salariés de Véolia ?__%%% Un exemple vaut bien de grands discours. Je vais donc vous parler de Sonia, 25 ans qui a 2 ans d’ancienneté sur le réseau. Son salaire est de 1350 euros net par mois, comme tous les débutants. Avec une telle rémunération, impossible pour elle de se loger dans la CUB. Le nombre d’agents, qui comme elle, ont du s’exiler là où la pression foncière est moins forte sont très nombreux. Et j’insiste sur ce point parce que tous les élus ici, en particulier les maires, sont concernés. L’étalement urbain et ses conséquences relèvent de notre responsabilité. Près de la moitié des chauffeurs ou des conducteurs résident en dehors de la CUB. Concernant Sonia, elle a trouvé un toit à prix abordable à Saint Symphorien, à 55km de Bordeaux, soit à 1h03 de son lieu de travail. Je n’ai pas besoin de vous expliquer qu’après avoir réglé son loyer, ses dépenses de carburant, son prêt voiture et ses charges courantes, il ne reste pas grand chose à Sonia à la fin du mois et c’est la raison pour laquelle la prime de 13ème mois, fruits de vieilles négociations syndicales et actées dans les conventions collectives, est tout à fait bienvenue. Les conventions collectives, justement, limitent le temps quotidien des agents au volant à 7h36, pauses ou déplacements à vide inclus. Si on prend le cas de Sonia et des nombreux agents qui résident loin de leur travail, c’est au minimum 10 heures de conduite par jour. 10 heures de vigilance au volant. Il faut bien avoir à l’esprit ce chiffre, j’y reviendrai. Ce ne sont pas des conditions de travail, vous le reconnaitrez, outrageusement avantageuses et les très légères adaptations sont amplement justifiées par les conditions difficiles auxquels les chauffeurs de bus et peut-être plus particulièrement les conducteurs du tramway sont soumis. J’ajoute pour terminer sur les conditions de travail que Sonia, comme tous les agents, travaille, sans supplément de salaire par rapport à ce que j’exposais, 5 week-ends sur 12. Cela signifie que presque un week-end sur deux, Sonia est dans son bus. C’est, j’espère que vous vous en rendez-compte, une épreuve pour la vie de famille. Je suis fils d’un chauffeur de bus de Véolia qui a 31 ans d’ancienneté, mon âge, et vous pouvez me croire si je vous dis que les sacrifices sur la vie de famille sont importants. Je vous expose tout ça pour vous dire que l’on n’est pas en présence de nantis ou de privilégiés. Que quand j’entends que les salariés pourraient être plus productifs je fais des bonds. Et j’en viens à mon dernier point : la mise en cause des acquis sociaux des salariés. __3) Peut-on oui ou non protéger les acquis sociaux des salariés ?__%%% J’aimerais vous convaincre qu’il ne nous est pas possible d’accepter la remise en cause des acquis sociaux des salariés. Nous avons entendu parler de semaine à 4 jours ou de défiscalisation des temps de pause en les sortant du 7h36. Si cette mesure était adoptée, le temps de travail pour un agent se porterait non plus à 7h36 mais à 8h45 + 50 min = 9h35. Et si on reprend l’exemple de Sonia, elle devra, avec son aller-retour domicile travail, conduire presque 12h00 par jour. Abolir le 7h36, c’est prendre un risque énorme en termes de sécurité, pour les agents bien sûr, mais également pour les passagers. Nous, CUB, ne pouvons pas prendre ce risque. Et qu’on ne me parle pas de volontariat, parce qu’on sait tous ici qu’il n’y a aucun choix. Dans le cas de Sonia, en travaillant 4 jours, elle économisera 1/5ème de son budget carburant, soit 70 euros mensuels environ. Ce qui est très incitatif. Le caractère facultatif pour quelques uns n’est que le cheval de Troie de ce qui deviendra obligatoire pour tous, et c’est la raison pour laquelle les syndicats nous alertent. Il ne faut pas, mes chers collègues, que la boite de Pandore soit ouverte. Les inquiétudes exprimées par les syndicats ont provoqué une marche arrière apparente de Kéolis qui, dans son récent courrier au Président Feltesse, assure qu’elle ne touchera pas aux conventions collectives. Ne pas toucher aux conventions collectives serait donc synonyme du maintien de la prime de 13ème mois et de la préservation du 7h36, mais également les acquis en matière de RTT, de grille d’ancienneté ou de congés. Les engagements de Kéolis seraient pour moi amplement suffisants pour dissiper les doutes légitimes des salariés. Mais voilà, pour ma part, je n’ai aucune confiance en Kéolis (pas plus d’ailleurs que j’en avais pour Véolia). Kéolis qui, le lundi dans la presse, parle de semaine à 4 jours et le mardi, pour éteindre le feu, prétend le contraire. Je n’ai pas confiance et c’est la raison pour laquelle je vous demande, Monsieur le Président, de faire en sorte que les engagements de Kéolis lui deviennent opposables. Il faut rendre contraignant, juridiquement parlant, l’affirmation de Kéolis de ne pas toucher aux acquis sociaux des salariés. Il faut donner une valeur juridique au courrier de Kéolis en l’annexant par exemple à la présente délibération. Si cela est le cas, et c’est mon dernier mot, je voterai cette délibération.

  1. 10 décembre 2008 - Répondre

    Bonjour, Mathieu

    Super article, mais tu as oublié peut etre que ce contrat avec Kéolis va avoir aussi avoir des répercution sur les salariés privés qui sont dédiés à des lignes de bus extérieur à Bordeaux et qui sont actuélement dans le groupe Véolia (actuélement 70 salariés), il ne faudrait pas les oublier, car ils ne savent pas ce qu’ils vont devenir, malgrès une lettre du CE d’une de ses ets au CG qui est rester lettre morte.

    un secrétaire général des transports routiers (privés) d’une OS
    et militant au PS

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